domenica 22 aprile 2018



SIMENON SIMENON. NOUVEAU PORTRAIT DE MAIGRET 
Maigret vu par les autres; critiques littéraires et essayistes 

Après le dernier roman Maigret qui paraît chez Fayard en 1934, Simenon accorde une pause à son personnage, dont il se contente, pendant quelques années, de raconter les aventures dans des nouvelles parues dans des journaux. A la fin 1939, il renoue plus étroitement avec son héros, reprend la rédaction de romans pour narrer ses enquêtes, et un premier recueil de trois romans, Maigret revient, paraît en octobre 1942 chez Gallimard. Dans le journal Comoedia du 12 décembre, la chroniqueuse Yanette Deletang-Tardif se fait l'écho du plaisir des lecteurs à retrouver Maigret. 
"Maigret remplit un roman jusqu'aux bords. Il le remplit d'abord physiquement, du chapeau et de la célèbre pipe, jusqu'aux pas lourds reconnaissables de si loin. Il le remplit aussi allégoriquement. Il le remplit enfin avec une présence plus interne, une possession en quelque sorte prémonitoire de tous les éléments de l'aventure."  

SIMENON SIMENON. NUOVO RITRATTO DI MAIGRET 
Maigret visto da altri; critici e saggisti letterari 

Dopo l’ultimo romanzo di Maigret, che uscì con Fayard nel 1934, Simenon concede una pausa al suo personaggio, di cui si contenta per qualche anno di scriverne le avventure in racconti apparsi nei giornali. Alla fine del 1939, si riavvicina di più al suo eroe, riprende la redazione di romanzi per raccontare le sue inchieste, in una prima raccolta di tre romanzi, Maigret revient pubblicata nell’ottobre del 1942 con Gallimard. Nel giornale Comoedia del 12 dicembre, la cronista Yanette Deletang-Tardif riporta l’eco del piacere dei lettori nel ritrovare Maigret. 
«Maigret riempe il romanzo fino ai bordi. Lo riempe prima di tutto fisicamente, dal cappello, alla celebre pipa, fino ai pesanti passi riconoscibili da così lontano. Li riempie anche allegoricamente. Li riempie infine con un presenza interiore, un possesso in qualche modo preminitore di tutti gli elementi dell’avventura».   

 SIMENON SIMENON. MAIGRET'S NEW PORTRAIT 
Maigret seen by others; literary critics and essayists 

After the last Maigret novel published by Fayard in 1934, Simenon granted his character a break, and for some years he would tell his adventures only in short stories published in newspapers. At the end of 1939 he reconnected with his hero and wrote new novels to narrate his investigations; a first collection of three novels, Maigret revient (Maigret comes back) was published by Gallimard in 1942. In the newspaper Comoedia of December 12, columnist Yanette Deletang-Tardif echoed the readers' pleasure of meeting Maigret again.  
"Maigret fills a novel up to the edges. He fills it up first physically, from the hat and the famous pipe up to the from afar recognizable heavy steps. He also fills it up allegorically. And last he fills it up with a more internal presence, a kind of prescient possession of all the elements of the adventure.   

by Simenon Simenon

sabato 21 aprile 2018

SIMENON SIMENON. LE ROMANCIER ET SES LECTEURS

A propos d'un livre consacré au courrier des lecteurs de Simenon 

SIMENON SIMENON. IL ROMANZIERE E I SUOI LETTORI 
A proposito di un libro sulle lettere dai lettori a Simenon 
SIMENON SIMENON. THE NOVELIST AND HIS READERS 
About a book that deals with the readers' letters to Simenon 


Véronique Rohrbach est docteure ès lettres 
de l'université de Lausanne. 
Elle a consacré sa thèse à l'étude des lettres que les lecteurs adressaient à Simenon. 
Elle vient de publier un livre, "Le courrier des lecteurs à Georges Simenon, L'ordinaire en partage", publié par les Presses Universitaires de Rennes. 
Son livre est très intéressant, parce qu'il ouvre de nouvelles perspectives sur l'oeuvre du romancier, qui permettent de voir celle-ci sous un autre angle, différent des nombreux travaux qui ont déjà été écrits sur Simenon. 
Nous avons demandé à Véronique Rohrbach de répondre à quelques questions sur son travail, et nous la remercions vivement d'avoir accepté. 


M.W. Quel était le but de cette étude et pourquoi avoir choisi Simenon ? 
V.R. Il s’agissait pour moi de mieux comprendre ce qu’on peut nommer la lecture «ordinaire», appelée ainsi par opposition à la lecture savante, celle que lon étudie et que l’on enseigne à l’école et à l’université. Dans ce but, Simenon s’est révélé un cas idéal, puisqu’auteur «populaire», pratiquant un genre dit «populaire» (le roman policier) et, bien sûr, auteur à succès. Il s’est aussi révélé idéal dans la mesure où, ainsi que je l’ai découvert, il a reçu un courrier abondant de la part de ses lecteurs, attestant de la réception concrète de son œuvre. 

M.W. Comment, concrètement, avez-vous mené votre étude ? 
V.R. Je me suis rendue à plusieurs reprises au Fonds Simenon, à Liège, où sont conservées les archives de l’auteur. J’y ai découvert plus de 6000 lettres de lecteurs qui n’avaient jamais fait l’objet d’une étude. Pour ma recherche, jai examiné de près quelque 2000 lettres, couvrant une période qui va de l’après-guerre jusqu’à l’annonce par Simenon de l’arrêt de ses romans, en 1972. 

M.W. Qu'est-ce que cette étude vous a apporté sur la connaissance de Simenon ? 
V.R. Essentiellement ce que les lecteurs ont perçu chez lui, à savoir que l’auteur reprend bien des traits à son personnage phare, Maigret: bienveillance, empathie, attirance pour les destins brisés, les «petites gens». Ce sont des traits qui ont amené les lecteurs à écrire à Simenon pour lui confier, comme à Maigret, leurs propres soucis. 

M.W. Depuis que vous avez mené cette étude, lisez-vous autrement les œuvres de Simenon (et aussi celles d'autres auteurs) ? 
V.R. Je pense inévitablement à tous ces lecteurs dont j’ai lu les lettres et qui ont puisé du réconfort, un enseignement, une inspiration pour un voyage ou se sont distraits dans un moment d’ennui – des circonstances parfois décrites avec beaucoup de précision par les épistoliers, qui s’essaient ainsi eux aussi à l’écriture. 

M.W. Après avoir lu toutes ces lettres de lecteurs, arriveriez-vous à tracer un portrait de Maigret vu par les lecteurs ? 
V.RC’est pour certains lecteurs un personnage qui revêt les traits du sauveur: on espère de lui que comme dans la fiction, il vienne à bout de situations humaines compliquées, une mort mystérieuse ou un héritage problématique par exemple. Et pour la majorité des lecteurs, Maigret est un personnage attachant de par sa bonhommie et sa profonde bienveillance. 

M.W. Au vu des réponses que Simenon a données à ces lettres de lecteurs, comment définiriez-vous le rapport entre le romancier et ses lecteurs ?  
V.RSimenon se pare très souvent des qualités du confident que l’on attribue habituellement au médecin ou au psychothérapeute: on fait appel à lui comme à une aide potentielle ou simplement un confident. C’est aussi un modèle pour se lancer dans la carrière d’écrivain et dans ce sens on s’adresse à lui pour lui demander des conseils ou soumettre un manuscrit. 

M.W. Pourquoi, à votre avis, Simenon conservait-il avec un tel soin toutes ces lettres ? 
V.R. Ce courrier avait de la valeur pour lui: ces témoignages de personnes vivant des choses difficiles à la manière de ses propres personnages peut-être le confortaient-ils dans ses choix fictionnels ? 

M.W. Avez-vous pu définir quelle importance Simenon accordait à ces lettres, dans le cadre de sa création littéraire ? 
V.RC’est difficile de le savoir car à ma connaissance Simenon n’a pas évoqué publiquement le lien entre ce courrier et sa création. 

M.W. Si vous deviez vous mettre dans la peau d'un lecteur, qu'auriez-vous eu envie d'écrire à Simenon ? De quoi auriez-vous eu envie de lui parler ou qu'auriez-vous eu envie de lui demander ? 
V.R. J’aurais peut-être fait comme ces lectrices qui se sont plaintes du sort fait à Mme Maigret et demandé à son créateur de l’émanciper quelque peu de son foyer ! 

M.W. Et pour finir, l'inévitable question (!): quel est votre roman de Simenon préféré, parmi les romans durs et parmi les Maigret, et pourquoi ? 
V.RJe n’ai pas de roman préféré parmi les romans durs, que j’affectionne moins que les Maigret. Et parmi ces derniers, je dirais L’Affaire Saint-Fiacre pour l’aspect très classique de ce récit policier.