martedì 7 febbraio 2017

SIMENON SIMENON. LE DERNIER DEMENAGEMENT

Simenon et sa "petite maison rose" 

SIMENON SIMENON. L'ULTIMO TRASLOCO 
Simenon e la sua "casetta rosa"  
SIMENON SIMENON. THE LAST MOVING 
Simenon and his "little pink house" 

Le 6 février 1974, Simenon prend possession de ce qui sera sa dernière maison, au numéro 12 de l'avenue des Figuiers, à Lausanne. Il a eu 70 ans l'année précédente, et depuis lors, il a renoncé à être romancier: il n'a plus la force de se mettre dans la peau de ses personnages, et c'est lui-même qu'il cherche maintenant à raconter, en égrenant des paroles sur un magnétophone. Depuis la fin octobre 1972, après avoir échoué dans la rédaction d'un roman, il a quitté Epalinges, qui avait été, en somme, davantage un lieu d'écriture qu'un lieu de vie, et il s'est installé au huitième étage d'un immeuble lausannois. L'âge venant, cependant, il commence à trouver que ce huitième étage n'est pas ce qu'il y a de plus pratique, et il craint des pannes d'ascenseur. C'est alors qu'il repère, non loin de son immeuble, une petite maison. On peut suivre, grâce à sa dictée Des traces de pas, une sorte de chronique de son déménagement, et on verra combien, comme à chaque fois qu'il s'installe dans un nouvel endroit, il vit cette période transitoire dans une certaine euphorie, comme si changer de lieu, c'était changer de peau, une façon de passer une nouvelle ligne, de devenir un autre, dans cette perpétuelle fuite d'un homme qui affirmait ne pas s'aimer lui-même… Bien que, finalement, dans cette exaltation de l'homme de 70 ans, on le retrouve égal à lui-même, tel qu'on l'a vu à chaque nouvelle étape de sa vie… 
Le 4 novembre 1973, Simenon dicte: "Presque tous les jours, je regarde par la fenêtre une petite maison en brique, tout en longueur, avec un seul étage mansardé. Je la regarde avec envie. Elle n'est pas occupée pour le moment mais rien n'indique qu'elle soit à vendre." Homme des décisions rapides, Simenon ne s'attarde pas en rêvassant, et le lendemain 5 novembre, le pas est déjà franchi: "Je viens d'acheter une maison. […]  depuis six mois j'en rêve. […]Ce matin, Teresa lit dans le journal une petite annonce annonçant qu'elle est [à vendre]. J'ai tout de suite téléphoné, pris rendez-vous, visité et acheté. " Le 6 novembre, l'exaltation prend son essor: "Je sens que je vais, pendant les prochaines semaines, passer des journées agitées comme je les adore. Déjà hier soir, dans mon lit, j'ai décidé de ce que je mettrais à tel ou tel endroit de la maison. […] Une chose me frappe. Je suis né et j'ai vécu mon enfance dans une petite maison pour employé ou petit rentier. Je suis en train de faire un retour aux sources et cela m'enchante. […] chaque fois que je change le cadre de ma vie, je ressens une exaltation et je me gonfle d'espoir." Et les jours suivants, il continue sur le même ton: "Je ne pense plus ou moins à rien d'autre qu'à ma petite maison […] Dix fois par jour, je vais la regarder par la fenêtre et je voudrais mettre tous les corps de métier en chantier à la fois.""C'est une période qui m'exalte […] et je ne passe pas de journée, sinon de demi-journée, sans aller me rendre compte de l'avancement des travaux. […] J'aurais toujours voulu aménager des maisons. Au fond, n'est-ce pas ce que j'ai fait puisque celle-ci dépasse la trentième."; "Hip hip hurrah ! Ce matin à huit heures on m'a apporté la clé […]. C'est un enchantement. Cela dépasse ce que j'espérais […] j'ai hâte de me sentir dans cette maisonnette qui a l'air d'un jouet." 
Dès le lundi 12 novembre, les ouvriers se mettent au travail, et, le 15 novembre, Simenon dicte: "Tout cela, qui ressemble à une création, m'excite. Je voudrais être là toute la journée et assister minute par minute à la transformation. Je ne peux plus. Cela me fatigue. […] Mais, comme je me connais, je m'y rendrai encore tous les matins et tous les après-midi. […] C'est une manie. Ma bonne vieille manie qui date de plus de cinquante ans. Je vais devoir me créer de nouvelles habitudes […] En somme, une nouvelle vie". Les semaines passent, et Simenon vit toujours sur son nuage: "Deux fois par jour, au moins, je descends dans ma petite maison pleine d'ouvriers […]. C'est devenu pour moi une passion. […] Bref, je suis obsédé par cette bicoque." (21 novembre). 
Il va néanmoins devoir encore patienter, le temps de terminer les travaux. Le 17 janvier 1974, il dicte, anxieux de savoir où poser ses marques: "Je sais où je m'assiérai, où je dicterai, où je coucherai, bien entendu. […] Ce qui est le plus important, c'est d'emmener avec moi dans un autre cadre toutes les manies qui marquent mon existence". Ou comment se fuir dans un ailleurs pour mieux se retrouver… 
Le 6 février, un incendie se déclare dans son immeuble, et cette alerte pousse Simenon à déménager une semaine plus tôt que prévu: "il vient de se produire un merveilleux tournant dans ma vie […] je me sens rajeuni d'au moins vingt ans" sont les premières paroles qu'il dicte, alors que l'après-midi de ce même jour, il vient juste de s'installer dans la petite maison rose. Il y est venu chercher une "sérénité introuvable", comme l'écrit si bien Assouline, et il ne sait pas encore que ce sera là sa dernière maison, où il connaîtra quelques petites joies du quotidien, mais aussi de terribles malheurs, et, lui qui avait renoncé à l'écriture, c'est dans sa petite maison rose qu'il va rédiger ses Mémoires intimes, et c'est là aussi qu'il quittera définitivement ce monde, après y avoir passé les quinze dernières années de sa vie…  

Murielle Wenger

lunedì 6 febbraio 2017

SIMENON SIMENON. “THE DREAM HOUSE FOR A NOVELIST”

About Shadow Rock Farm, Lakeville, Connecticut, USA 

SIMENON SIMENON. LA MAISON DE REVE POUR UN ROMANCIER 
À propos de Shadow Rock Farm à Lakeville dans le Connecticut aux Etats-Unis 
SIMENON SIMENON. "UN'ABITAZIONE DA SOGNO PER UNO SCRITTORE"
A proposito di Shadow Rock Farm a Lakeville, nel Connecticut, Stati Uniti

In 1950, Simenon picked out his “dream house” in Lakeville, Connecticut. According to details in a income tax case filed against him later on, he first rented the house on July 27, 1950 and subsequently purchased it on November 1, 1950. He lived there until March 19, 1955 when he left the USA for goodBefore departing, he instructed his lawyer and real estate agent to offer the property for sale. However, it did not sell and, in fact, remained unoccupied until December 1957. It was rented thereafter up until it was sold on July 15, 1963.
In 1953, Paris Match published an article describing Simenon’s “26th house” as summarized here: Shadow Rock Farm derives its name from an old Native American legend. It sits without nearby neighbors at the bottom of a valley with a flowing stream and a hill of rocks and trees behind. Originally constructed in 1760, iis now of the style called "rambling" in America, as if wings were added during expansions without worrying about symmetry, the way branches grow on a tree. Built on several levels, it contains 18 rooms with 8 bedrooms and 6 bathrooms. Although a plain white house on the outside, inside everything is painted, lacquered, and varnished, bright and bursting with color. Simenon’s office is a small, soundproofed room underground. It contains a grey metal desk with the “classic and sober look like that of an American businessman.” On the desk, there is a typewriter, some white paper, a manila envelope with the outline of a developing novel scribbled in pencil on its back, and a ready arsenal of cleaned pipes. The article concludes: “The principal characteristic of Shadow Rock Farm […] is that Simenon’s personality determines everything. […] The property has neither walls nor hedges, like all American properties [DPS: this would actually be atypical for an old New England farm], but the outside world is stopped at its border as though pushed back by the dense Simenon atmosphere it comes up against.” Simenon’s own words “I am rooted here tend to support this interpretation. 
In 1954, I had a curious chance experience while visiting a high school classmate in Lakeville. We were driving around the countryside, looking for things to do, when we passed by a large, sprawling white farmhouse, well off the road, sitting up on a hillside. Pointing up to it, my friend mentioned by name the famous French author who lived there. I was then in my second year of studying French and excited by the challenge, but the Georges Simenon he was referring to was just a name. 
In 1984soon after the happy rekindling of a desire to read French novels after a 30-year interludeI happened to be visiting a similar small Connecticut town about 13 miles from Lakeville. As I was poking around at the town library’s used book sale, I came across a stack of five Maigret novels offered at the attractive price of five cents apiece. The Yankee in me told me to check their condition, so I flipped through themand striking image flashed into my brain: lo and behold, it was Shadow Rock Farm. saw then and can still visualize exactly how it looked way back in 1954 (as the image above graphically confirms). 

David P Simmons