Que se passait-il pour Simenon en septembre 1930?
SIMENON SIMENON. UN PERIODO CRUCIALE
Cosa stava succedendo per Simenon nel settembre 1930?
SIMENON SIMENON. A CRUCIAL PERIOD
What was happening for Simenon in September 1930?
Septembre 1930. Les aviateurs français Costes et Bellonte ont réussi la première traversée de l'Atlantique Nord sans escale. En Allemagne, lors des élections, le parti d'un certain Adolf Hitler remporte 107 sièges au Reichstag. Aux USA naît Raymond Charles Robinson, qui deviendra Ray Charles pour la musique. Une tempête d'équinoxe dévaste les côtes de Bretagne et de la Manche. Parution en album de Tintin au pays des Soviets. L'ingénieur Richard Drew invente le Scotch tape. Éruption du Stromboli. L’hebdomadaire La Jeunesse illustrée publie en feuilleton Le Document violet, d'un certain Georges Sim.
Pendant ce temps, Simenon, lui, est amarré à Morsang depuis le printemps. Il a écrit Le Charretier de la « Providence » et Monsieur Gallet, décédé, deux romans qu'il va présenter à Fayard pour mieux le convaincre de l'intérêt de son héros commissaire, après lui avoir fait lire Pietr le Letton, qui, en ce mois de septembre, paraît en feuilleton depuis deux mois dans Ric et Rac.
En date du 24 septembre, le romancier signe avec son éditeur un contrat pour au moins quatre romans, dont les titres sont L’Écurie (titre pour Le Charretier de la « Providence »), La Chasse à l'ombre (pour Monsieur Gallet, décédé), L’Épave et Fièvre ; les deux derniers ne paraîtront qu'en 1932, et dans Fièvre apparaît un commissaire Torrence, qui n'a qu'une lointaine ressemblance avec l'inspecteur qui travaille avec Maigret dans Pietr le Letton. Durant l'automne, Simenon va écrire aussi Le Passager du « Polarlys », qui paraîtra d'abord en feuilleton dès novembre, sous le titre Un crime à bord, dans le journal L'Œuvre, mais sous la signature Georges Sim, tout comme La Maison de l'inquiétude, publié quelques mois plus tôt dans le même journal, et qui voyait la première apparition « publique » du commissaire Maigret.
En ce début d'automne 1930, Simenon était au four et au moulin, fournissant encore des romans populaires, mais expérimentant déjà de nouvelles configurations. Il cherchait sa voie, qu'il avait ouverte une année plus tôt, en septembre 1929, quand, aux confins de la Hollande, il avait vu se dresser devant lui la silhouette d'un personnage massif, vêtu d'un imperméable et fumant la pipe, et dont il pensa qu'il pourrait s'en servir pour passer à une nouvelle étape dans sa carrière de romancier.
Comment faut-il imaginer Simenon à ce moment-là ? Plein d'assurance, comme il savait parfois se montrer ? Confiant en sa bonne étoile et en ses capacités de bâtir un monde en romancier ? Ou au contraire plein de doutes et d'hésitations, surtout après avoir dû âprement discuter avec Fayard des conditions pour pouvoir lancer une collection policière ?
Régine, sa femme, connaît bien son Georges, dont elle campe un portrait plein de vérité dans son livre de Souvenirs ; pour l'année 1930, elle note à propos de son mari : « En pleine forme pour livrer sa première bataille littéraire […] Il est plein de confiance et d'ambition. Tout serait parfait. Mais pourquoi est-il si nerveux et angoissé. »
Simenon lui-même a évoqué plusieurs fois cette période, dans des interviews et dans ses textes autobiographiques. Mais en romancier, sans doute en déformant quelque peu la réalité des faits et des événements. Pour bien le « sentir » en ce mois de septembre 1930, le voir vivre cette période cruciale pour son avenir littéraire, il faudrait pouvoir lire sa correspondance de l'époque, où probablement il se livre avec le plus de vérité… Nous espérons vivement qu'un jour cette correspondance puisse être publiée (nous savons à quel point c'est un travail de longue haleine), non pas pour nous en emparer en voyeurs, mais parce qu'elle nous permettrait de mieux cerner l'homme et le romancier…
Murielle Wenger