martedì 9 marzo 2021

SIMENON SIMENON. DENIS TILLINAC, LECTEUR PASSIONNÉ DE SIMENON

L'admiration de Tillinac pour Simenon et l'influence du second sur le premier

DENIS TILLINAC, LETTORE APPASSIONATO DI SIMENON
L'ammirazione de Tillinac per Simenon e l'influenza del secondo sul primo


Le romancier et essayiste Denis Tillinac, disparu le 26 septembre dernier, était un grand lecteur de Simenon. Son essai Le Mystère Simenon, paru en 1980 aux éditions Calmann Lévy, réédité dans la collection La Petite Vermillon en 2003, est une analyse originale de l’œuvre de Simenon et en même temps un exercice d’admiration. Ce que l’on sait moins, c’est que Denis Tillinac ne perdait pas une occasion de faire allusion à Simenon dans ses propres romans et même dans les essais qu’il a signés, notamment aux éditions de La Table Ronde.
Déjà dans Le Rêveur d’Amériques, paru la même année que son essai sur Simenon, Ricky, le héros du roman, séjournera à Port-en-Bessin « un petit port de pêche de la côte normande – parce que Simenon y avait inscrit diverses intrigues ». Dans Spleen en Corrèze (1984), Tillinac raconte ses premières expériences de journaliste localier et pense au romancier belge : « J’ai choisi ce métier parce qu’il m’introduit au cœur des choses sans exiger de moi la moindre adhésion (…) Ma présence aux « événements » dont je rends compte dans La Gazette ressemble à l’attitude des héros de Simenon. Comme moi, ils subissent avec une indifférence pâteuse la donne du monde extérieur. Ils ne jugent jamais. Juger quoi, au nom de quoi ? ». Quelques années plus tard, dans L’Irlandaise du Dakar, en 1986, il évoque l’Afrique coloniale de Simenon, certes différente de celle qu’il découvre sur la course du Dakar. Et dans Un léger malentendu, roman qui revient sur les événements de mai 68, le narrateur fuit la capitale sur son solex et reprend le chemin de Moulins, au cœur de sa campagne bourbonnaise : « Nous allions à Paray-le-Frésil, reconnaître les décors de L’Affaire Saint-Fiacre de Simenon, qui a peint d’après nature le déclin des aristos bourbonnais ».
Lors de la disparition de Simenon en septembre 1989, Tillinac signe un bel hommage au romancier belge dans L’Evénement du jeudi qui commence par ces mots : « J’ai découvert Simenon à l’âge où l’on cherche dans les livres de quoi comprendre son époque et il m’a semblé que les vicissitudes de la conscience moderne se reflétaient dans la fausse platitude de ses romans, plus crûment que chez les théoriciens de l’absurde ou de la "déconstruction" ». Dans ses essais, Tillinac ne manque jamais de faire allusion à Simenon, avec par exemple un canal, décor privilégié de nombreux romans simenoniens (Dernier verre au Danton, 1996). À l’occasion d’un séjour à Cayenne, il écrit Le Bar des palmistes (1997), et dans la torpeur de cette ambiance moite, l’œuvre de Simenon n’est pas loin : « Rien n’a d’importance au Bar des palmistes : on y ressent cette vacance de l’être si bien décrite par Simenon dans ses romans tahitiens, Touristes de bananes ou Le Passager clandestin ». Dans Les Masques de l’éphémère, publié en 1999, l’hommage à Simenon est patent : « Simenon a sans doute achevé l’histoire de nos littératures en peignant sur le vif un antihéros qui synthétise l’homme sans qualités de Musil, le Meursault de Camus et le Roquentin de Sartre : une concrétion déracinée, socialement équivoque comme le petit bourgeois, comme lui flouée de l’histoire, et comme lui fétu girouettant au gré des pulsions innommables ».On pourrait citer bien d’autres exemples dans l’œuvre de Denis Tillinac : son admiration pour Simenon est constante au cours de quarante ans d’écriture. Le jeune journaliste s’était fait remarquer après la publication de son Mystère Simenon en 1980. Peu après sa disparition, son dernier livre est paru aux Presses de la cité, Le Patio bleu (novembre 2020). Ce roman lucide et désenchanté contient les thèmes chers à Tillinac et dans cet ultime regard sur notre société, Simenon n’est pas absent, comme en témoigne cet extrait où le narrateur fait partager ses goûts littéraires à un ami : « Mon seul titre de gloire aura été de l’initier à Simenon. Par curiosité, j’avais acheté Le Grand Bob, toujours chez un bouquiniste, je n’avais pas les moyens de m’offrir des livres neufs. Ce roman m’avait subjugué. J’en ai lu d’autres, par dizaines. J’ai prêté Trois chambres à Manhattan à Fabrice et sa conversion fut immédiate. Pendant des mois nous avons vécu dans le sillage ombreux de Simenon, hantant la nuit venue les bars à entraîneuses de Montmartre, pour l’ambiance. » Dans toute son œuvre, Denis Tillinac a fait surgir Simenon, pour traduire une atmosphère, pour évoquer un lieu, et surtout pour évoquer les inquiétudes et les angoisses de l’homme de son siècle.
Bernard Alavoine

Nessun commento:

Posta un commento

LASCIATE QUI I VOSTRI COMMENTI, LE VOSTRE IMPRESSIONI LE PRECISAZIONI ANCHE LE CRITICHE E I VOSTRI CONTRIBUTI.