Quelques réflexions sur Le charretier de la Providence, et les
critiques lors de sa parution
SIMENON SIMENON. IL CARRETTIERE ATTRA LA
PROVVIDENZA ?
Alcune
riflessioni su Il carrettiere della Provvidenza,
e le recensioni al momento della sua pubblicazione
SIMENON SIMENON. DOES THE CARTER ATTRACT PROVIDENCE?
Some
thoughts on The Carter of 'La Providence', and reviews at the time it
was published
Nous sommes en mars 1931. Simenon vient de vivre
la folle nuit du Bal anthropométrique, et sans doute en est-il à se demander si
celui-ci aura une suite, si ce ne sera qu'un épisodique succès médiatique, ou
si, au contraire, c'est le début d'un vrai lancement pour son nouveau héros…
Retiré dans un hôtel à La Ferté-Alais, Simenon se met à écrire d'autres romans
pour le commissaire (Le chien jaune et
La nuit du carrefour). En librairie,
sont sortis Le pendu de Saint-Pholien et
Monsieur Gallet, décédé. Mais il a
déjà donné à Fayard les tapuscrits de Pietr
le Letton (dont on sait que l'éditeur a préféré le faire paraître en
feuilleton dans le journal Ric et Rac)
et de Le charretier de la Providence.
Ce dernier a été rédigé à la même époque (soit l'été 1930) que Monsieur Gallet décédé, et avant Le pendu de Saint-Pholien (automne ou
hiver 1930). Et pourtant, ce n'est pas Le
charretier qui a été retenu pour le lancement à la Boule Blanche, sans
qu'on en connaisse vraiment la raison (nous en avons déjà parlé plusieurs fois
sur ce blog).
Cependant, Le charretier de la Providence a quand même dû avoir une certaine
importance pour Simenon, ou en tout cas une certaine signification dans
l'ascension du romancier vers la reconnaissance littéraire. En effet, c'est ce
roman qui est choisi pour être publié en mars 1931, soit le premier roman à la
suite des deux qui inauguraient la nouvelle collection, et probablement Simenon
a-t-il dû se dire qu'on "l'attendait au tournant". Le pendu et Gallet avaient bénéficié du battage médiatique du Bal
anthropométrique, et, comme l'ont écrit certains commentateurs, après le Bal,
on parlait surtout, dans les journaux, de cette fête où le Tout-Paris s'était
rendu, bien plus que des deux romans eux-mêmes…
Mais, avec Le charretier, il s'agissait maintenant de confirmer une première
bonne impression, et de montrer de quoi le romancier était capable, sur le plan
non plus événementiel, mais sur le plan littéraire…
Comment faut-il imaginer Simenon, dans son
hôtel de La Ferté ? En train d'attendre avec impatience les journaux de Paris,
et se jetant avidement sur les critiques littéraires, pour y découvrir quelques
mots sur Le charretier de la Providence
? Ou, au contraire, déjà sûr de son succès, et ne se préoccupant que d'écrire
de nouveaux romans pour rester sur sa lancée ? Ou encore, hésitant sur l'avenir
de son commissaire, mais déterminé à mener l'essai jusqu'au bout, confiant dans
ses propres potentialités ?...
Le
charretier de la Providence paraît à la fin du mois
de mars 1931, et on peut dire que la bataille n'est pas gagnée d'avance… Comme
le remarque Pierre Assouline, on continue d'associer le nom de Simenon au mot
de "record" (l'annonce du livre, dans plusieurs journaux, se fait
sous ce titre, avec ces mots:" Qui n'a pas à son actif un record ? C'est
pourquoi Georges Simenon veut en établir un nouveau. […] Trois romans en un
mois, tel est ce record. Jusqu'où ira-t-il ?"), comme s'il s'agissait
d'épater la galerie plutôt que d'écrire un bon texte…
Parmi les premières critiques, celle de
René Lalou dans La Quinzaine critique des
livres et des revues, parue le 25 avril, et qui montre une certaine
déception (Lalou avait beaucoup aimé les deux premiers romans): "Le titre
même donne le mot de l'énigme; si bien que le roman vaut plutôt par l'évocation
de personnages que par l'enquête du commissaire Maigret; bref, la matière
paraît un peu péniblement étirée."
Si Simenon a lu cette critique, il y avait
de quoi douter de lui-même… Mais d'autres critiques ultérieures pouvaient le
rassurer. Ainsi, en août, paraissait, dans Les
Nouvelles littéraires, un article de Georges Charensol, un des premiers qui
ait deviné les potentialités du romancier; dans son article (qui fait partie de
la série "Les illustres inconnus"), Charensol évoque "ces œuvres
remarquables que sont Monsieur Gallet
décédé, Le pendu de Saint-Pholien, surtout Le charretier de la Providence et Pietr le Letton", et il conclut par ces mots: "On peut
dire sans craindre de beaucoup se tromper, que ce romancier populaire demain
sera un romancier tout court".
Une autre reconnaissance lui viendra
quelques temps plus tard: en août 1932, dans le journal L'Action française, Robert Brasillach écrivait un article intitulé
"Claude Aveline: La double mort de
Frédéric Belot et les Romans de Georges Simenon". Mis à part quelques
restrictions, Brasillach admire chez Simenon son art de créer une atmosphère, et
il ajoute: "je ne connais pas d'évocation plus mélancolique, plus exacte,
de la vie des canaux que cet étonnant Charretier
de la Providence, où la brume, l'humidité, l'eau lente composent un paysage
inoubliable". Et Brasillach remettait ça en août 1933, dans sa critique de
La maison du canal: "Simenon a
retrouvé, dans un décor à peu près semblable, le climat de son meilleur livre, Le charretier de la Providence".
Alors, pari gagné pour Simenon ? En ce mois
de mars 1931, rien n'était moins sûr, et le romancier n'avait plus qu'à
s'atteler à sa machine à écrire pour prouver que Maigret était le meilleur des
policiers…
Murielle Wenger
Davvero infelice il titolo dato al romanzo che rivela subito il nome del colpevole:che abbia influito sul non farlo presentare al Bal anthropométrique?
RispondiEliminaanche perchè i titoli presentati sono suggestivi(m gallet décédé et le pendu de saint pholien) e richiamano subito al giallo in voga all epoca
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