martedì 16 ottobre 2018

SIMENON SIMENON. NEW YORK, NOUS VOILÀ !

 La découverte de l'Amérique par le romancier, et ses impressions confiées à son héros 

SIMENON SIMENON. NEW YORK, ECCOCI QUI! 
La scoperta dell'America da parte del romanziere, e le sue impressioni affidate al suo eroe 
SIMENON SIMENON. NEW YORK, HERE WE ARE! 
The discovery of America by the novelist, and his impressions entrusted to his hero


Le 3 octobre 1945, Simenon pose le pied sur sol américain. Il vient de faire une traversée d'une quinzainde jours sur un cargo, accompagné par Régine et Marc. Il a quitté la vieille Europe, et il laisse derrière lui des souvenirs que, pour le moment, il préfère oublier. Devant lui s'ouvre une nouvelle vie, une vie comme neuve, pleine d'espérances. Sur le plan personnel, la crise de son couple le laisse ouvert à d'autres perspectives, et il est prêt à affronter l'inconnu. Sur le plan professionnel, il veut s'engager pour une bataille américaine, conquérir un nouveau monde de lecteurs; symptomatiquement, il a déjà pris langue avec un nouvel éditeur, et il a fait plus qu'envisager de quitter l'écurie Gallimard.  
Mais comme ce passage de la ligne représente tout de même un certain dépaysement, et qu'il faut un temps d'adaptation, le premier plan de Simenon est d'aller d'abord au Canada, plus précisément à Montréal, où l'on parle français. A la fin octobre, la famille s'installe à Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, dans la province de Québec. Le romancier, qui a besoin de se mettre au travail pour négocier des contrats avec les éditeurs américains, est à la recherche d'une secrétaire bilingue. C'est ainsi qu'un jour il est amené à rencontrer une jeune Canadienne qu'on lui a recommandée. Elle s'appelle Denyse. Coup de foudre à Manhattan…  
Leurs déambulations dans New York sont marquées au fer rouge de la passion. C'est la première fois, dit Simenon, qu'il éprouve un sentiment aussi ravageur, et c'est la découverte de ce sentiment qu'il va décrire, à chaud, dans son prochain roman, Trois chambres à ManhattanC'est en même temps la découverte de la vie nocturne de la ville, mais, en réalité, celle-ci n'apparaît qu'en arrière-plan dans le roman, où tout est concentré autour du couple François et Kay.  
Ce nouveau continent, il s'agit aussi de l'apprivoiser, de chercher à comprendre cet American way of life, cette mentalité, ces mœurs qui sont inédites pour le romancier. A la fin de l'année 1946, Simenon va sillonner l'Amérique du nord au sud, et ses découvertes seront relatées dans un reportage, L'Amérique en auto, dix-neuf articles dont onze sont publiés dans le journal France-SoirIl s'agit de raconter aux Européens les us et coutumes, les paysages de ce Nouveau Monde, qui contrastent si fort avec la vie quotidienne du Vieux Continent. Simenon leur parle des mythiques routes américaines, des drive-in où on sert des hot-dogs, des maisons et des villes si différentes…  
Parmi ces articles, il en est un qui s'appelle "La ville où chacun se sent chez soi", et qui est consacré à New York, une ville à laquelle Simenon dédie des lignes enthousiastes: "A New York, surtout si vous débarquez d'un bateau, vous vous trouvez immédiatement dans la ville que vous aviez imaginée. Les buildings sont exactement comme vous les avez vus au cinéma. Le mouvement de la rue n'a rien de frénétique et vous vous étonnez, au contraire, de pouvoir flâner tout à votre aise. […] J'aime New York, et m'y sens plus à l'aise que partout ailleurs, hors de chez nous. " 
Cette ville, Simenon s'est empressé de l'apprivoiser pendant les premières semaines qu'il y a passées avant de partir pour Montréal, et qu'il retrouvée à plusieurs reprises pendant cette période. Il se met petit à petit à découvrir le mode de vie, les mentalités, mais, au lieu d'en évoquer les détails dans son premier roman américain, consacré tout entier à sa rencontre avec Denyse, et bien avant de reprendre cette analyse des mœurs américaines dans des romans plus tardifs, il confie ses premières découvertes et ses premiers étonnements à son personnage fétiche, Maigret. 
On aurait très bien pu imaginer que, avec cette nouvelle vie en perspective, son héros commissaire soit lui aussi abandonné définitivement aux souvenirs parisiens d'une autre époque. Quelle place pouvait bien avoir dans ce nouvel environnement ce policier un brin suranné, avec ses goûts culinaires d'un autre temps, sa lenteur qui ne correspondait en rien à la trépidance américaine, ses méthodes à mille lieues de celledes détectives décontractés du hard boiled ?... Et pourtant…  
A peine un mois après Trois chambres à Manhattan, Simenon reprend la plume et écrit Maigret à New York. Alors qu'il aurait très bien pu, dans Trois chambres, raconter l'arrivée de François Combe à New York, c'est Maigret qu'il fait débarquer d'un cargo, découvrir la statue de la Liberté, pénétrer dans la ville à bord d'un taxi jaune, s'engouffrer dans Broadway, s'enfoncer dans le Bronx, et essayer de comprendre le fonctionnement de la ville et de ses habitants.  
Il n'y a pas de doute: le romancier, quoi qu'il en pense, a bien emmené, au-delà de l'Atlantique, ce personnage qu'il aurait pu laisser aux oubliettes. Il ne le sait pas encore, mais son héros va l'accompagner tout au long de sa vie et de son activité littéraire, et prendre une place plus importante qu'il n'aurait jamais pu l'imaginer… 

Murielle Wenger 

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