Des plages à la mode à un petit port de pêcheurs, pour Maigret arrive le cinéma
SIMENON SIMENON. DA DEAUVILLE A OUISTREHAM, LA STRADA VERSO LA GLORIA PER MAIGRET
Dalle spiagge alla moda ad un porticciolo di pescatori, per Maigret arriva il cinema
SIMENON SIMENON. FROM DEAUVILLE TO OUISTREHAM, A WALK OF FAME FOR MAIGRET
1931. Dix jours après la fête donnée pour le lancement de La folle d'Itteville, Simenon abandonne l'essai mort-né du phototexte avec G7, et il va se consacrer désormais à Maigret, comprenant que c'est ce personnage-là qui peut lui apporter la renommée. C'est ainsi que le 15 août, il est invité à dédicacer ses romans à Deauville, comme il l'a raconté dans une de ses Dictées (Point-virgule, dictée du 15 août 1977), comme nous vous l'avions rapporté naguère sur ce blog, dans un billet du 15 août 2012.
Quels sont les "huit romans", d'après ses dires, que Simenon a pu signer à ce moment-là à Deauville ? En suivant l'ordre des dates de parution, il ne peut s'agir que de Monsieur Gallet, décédé, le pendu de Saint-Pholien, Le charretier de la Providence, Le chien jaune, Pietr le Letton, La nuit du carrefour, Un crime en Hollande, et Au rendez-vous des Terre-neuvas, qui pouvait être tout juste sorti en librairie…
Dans une dictée du 16 août 1976 (Vacances obligatoires), Simenon évoquait déjà l'événement, avouant qu'il en était "assez excité" et qu'il a succombé, ce jour-là, à une sorte de "gloriole": "Cette passion, née en si peu de temps, m'a ébloui, je l'avoue, et j'ai vécu le reste de ce 15 août comme dans un rêve. […] J'étais très jeune. Je n'avais pas trente ans. Je ne nie pas que le sang me soit monté à la tête."
Mais, ajoute-t-il, "mon vieux fond de réalisme m'a vite guéri de cette bouffée de ce que je pourrais appeler la notoriété." Qu'on le croie ou non (la suite de sa vie montre qu'il a plus d'une fois joué avec cette notoriété…), il faut reconnaître qu'il a effectivement abandonné très vite les plages chics de Deauville. Comme il y était venu depuis Paris en descendant la Seine sur l'Ostrogoth, c'est toujours à bord de son fidèle bateau qu'il quitte Deauville, longe la côte sur quelques dizaines de kilomètres, pour aller s'installer "dans un petit port de pêche, Ouistreham, où je fréquentais non plus les banquiers, les industriels et la noblesse mais les simples pêcheurs." C'est avec ces derniers que Simenon s'amuse à des parties de bras de fer, où il gagne souvent, dit-il, grâce à l'expérience acquise dans les boîtes à matelots fréquentées lors de ses voyages dans les pays du Nord…
Mais, en attendant, c'est une autre partie qu'il engage, celle de continuer sur sa lancée avec la rédaction des Maigret: il faut en effet honorer le contrat passé avec Fayard pour une parution mensuelle de la collection. C'est ainsi qu'il écrit, à Ouistreham, La danseuse du Gai-Moulin en septembre et La guinguette à deux sous en octobre. Alors qu'on a longtemps pensé que Le port des brumes aurait été écrit en février 1932 à Antibes, il semble que les chercheurs simenoniens penchent plutôt actuellement pour une rédaction de ce roman en octobre 1931 à Ouistreham. Quoi qu'il en soit, la trame de ce roman se déroule précisément dans ce port, décrit avec réalisme par un romancier qui a bien connu les lieux…
Mais Ouistreham peut se glorifier, outre de la présence de Simenon et de celle de son héros venu enquêter sur place, d'un autre événement important pour le créateur et sa créature: c'est en effet là qu'a eu lieu une rencontre de conséquence pour ceux-ci, comme le raconte Simenon dans sa dictée: "Un beau matin, j'ai vu une Bugatti s'arrêter devant mon bateau, un homme déjà corpulent en descendre. C'était Jean Renoir, qui est devenu non seulement un ami, mais comme mon frère, et qui venait m'acheter les droits de mon premier film: La nuit du carrefour. Celui-ci a été suivi de beaucoup d'autres. Mais cette rencontre avec Jean Renoir […] a profondément marqué mes années futures. […] Ce 15 août-là et les jours qui ont suivi [ont] marqué une étape dans mon existence."
C'est en effet en ce mois d'août 1931 que Maigret entame son chemin vers la gloire, lorsque Simenon se rend compte, mieux qu'au Bal anthropométrique, qui avait été un événement plus médiatique que littéraire, de l'engouement des lecteurs pour son personnage; c'est aussi à Ouistreham que le commissaire entame la carrière que l'on sait sur le grand et le petit écran…
Pour Simenon, c'est une étape qui se termine, et, dans un geste symbolique, pour bien marquer le changement, il vend le bateau qui a été le berceau de son héros, déterminé maintenant à le faire grandir dans d'autres environnements…
Murielle Wenger
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