sabato 10 settembre 2016

SIMENON SIMENON. MAIGRET REVIENT… AU CINEMA/1 - PICPUS

A propos des films tournés pendant la guerre, avec Albert Préjean dans le rôle de Maigret

SIMENON SIMENON. MAIGRET TORNA… AL CINEMA/1 – PICPUS
A proposito dei film girati durante la guerra, con Albert Préjean nei panni di Maigret 
SIMENON SIMENON. MAIGRET COMES BACK… AT THE MOVIES/1 – PICPUS
About the films shot during the war, with Albert Préjean in the part of Maigret


Le 17 septembre 1941, la firme Continental Films adresse une lettre à Simenon, pour lui demander les droits d'adaptation de La maison du juge, que le romancier avait rédigé en janvier 1940. Cette firme cinématographique a été créée en octobre 1940 par Alfred Greven, dont le but est de faire renaître l'industrie du cinéma français, mais sous l'égide allemande. Pour choisir les sujets des nouveaux films à produire, on puise volontiers dans le répertoire du roman policier (L'assassinat du Père Noël, de Pierre Véry, ou L'assassin habite au 21, de Charles-André Steeman), mais les grandes plumes françaises sont aussi sollicitées (Balzac, Nerval ou Zola). Et, naturellement, la renommée de Simenon ne laisse pas indifférent dans ce domaine… A peine la Continental est-elle créée que l'on demande au romancier les droits d'adaptation pour Les inconnus dans la maison. Simenon, qui ne s'occupe pas trop de l'arrière-plan politique, voit surtout dans ces possibilités de contrats une importante ressource financière. On ne peut d'ailleurs guère lui reprocher d'avoir travaillé avec la Continental, car nombre de réalisateurs et d'acteurs firent de même: Clouzot, Decoin, Cayatte, Raimu, Fernandel, Michel Simon ou Danielle Darrieux, pour n'en citer que quelques-uns… Comme le dit Assouline dans sa biographie simenonienne, "paradoxalement, l'Occupation correspond à l'âge d'or du cinéma français", et pourquoi Simenon n'y aurait-il pas participé avec tant d'autres… En tout, neuf de ses romans seront adaptés pendant cette période, dont trois Maigret.
Le premier roman du commissaire que la Continental a en vue est La maison du juge. Assouline fait la remarque que la firme devait "être particulièrement bien informée et éplucher la presse", puisque le roman n'était pas encore sorti chez Gallimard (il ne le sera qu'en 1942 dans le recueil Maigret revient…). En effet, ce roman a d'abord paru en préoriginale dans le journal Les Ondes, un hebdomadaire lancé le 27 avril 1941 par Radio-Paris, placée elle aussi sous le contrôle de l'occupant. Pour son premier numéro, le journal, destiné, comme le disait la publicité, à "tous ceux qui veulent connaître les secrets des studios, les programmes radiophoniques complets, les confidences de nos vedettes", proposait aussi son feuilleton, et tout naturellement on avait fait appel à Simenon. Pour appâter le chaland, on accompagnait le lancement du feuilleton par un concours, doté de 50'000 francs de prix, dont nous ne connaissons pas les détails, mais où il s'agissait de répondre à la question: "Quel âge donnez-vous au commissaire Maigret ?".
Finalement, ce ne sera pas ce roman-là qui sera adapté, mais trois autres. En effet, Simenon, par un contrat signé en 1942, cède à la Continental l'exclusivité du personnage de Maigret pour trois ans; et pour la somme de 500 000 francs, la firme prend une option sur les droits de trois romans: Cécile est morte, La maison du juge et Maigret. Et, pour finir, ce sera Signé Picpus qui connaîtra le premier une vie sur pellicule…
Le tournage débute en novembre 1942, et le film sortira en février 1943, sous le titre Picpus. Dans le rôle du commissaire, un acteur inattendu: Albert Préjean, qui, s'il a plus ou moins l'âge du rôle (il est né en 1894), est plutôt connu pour avoir joué les jeunes premiers et le "chanteur de charme" dans des films de la décennie précédente… Bondissant et virevoltant, on a de la peine à l'assimiler au massif commissaire, comme le dit Maigret lui-même, par la plume de son créateur: "un certain Préjean, à qui je n'ai aucun reproche à faire […], mais qui ressemble beaucoup plus à certains jeunes inspecteurs d'aujourd'hui [Maigret écrit en 1950 ! ndlr] qu'à ceux de ma génération" (in Les mémoires de Maigret). Pour ne rien arranger, on l'affuble d'un inspecteur Lucas bafouillant, joué par André Gabriello, qui, s'il apporte une note comique, ressemble encore moins au brigadier tel que le lecteur le connaît, et le scénario lui-même prend une distance assez importante avec l'original… Préjean, interviewé à l'époque du tournage pour le journal La Vie parisienne, répond à la question "Votre Maigret, pourtant, sera moins silencieux et moins bourru que celui de Simenon ?": "Forcément. Le Maigret tel que l'a décrit l'auteur du Chien Jaune et de Picpus aurait été parfait au temps du cinéma muet. Le cinéma parlant le rend évidemment plus loquace et plus sympathique." Un point de vue comme un autre… Les critiques de l'époque, s'ils soulignent la différence entre Préjean et le personnage de Maigret tel qu'on se l'imagine, saluent tout de même l'interprétation de l'acteur, et peu s'étonnent des modifications de l'histoire par rapport à celle de Simenon… A leur décharge, on se demandera combien l'avaient lue sous la forme du feuilleton qui avait paru en 1941-1942 dans le journal Paris-Soir, puisque aussi bien, quand le film sortit en salle, le roman n'avait pas encore été publié dans le recueil de Gallimard, édité en janvier 1944 seulement…


Murielle Wenger

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