sabato 19 maggio 2018

SIMENON SIMENON. UN COMMISSAIRE EN GUERRE /1

Hypothèses sur ce que faisait Maigret pendant la première guerre mondiale 

SIMENON SIMENON. UN COMMISSARIO IN GUERRA /1 
Ipotesi su ciò che Maigret fece durante la prima guerra mondiale 
SIMENON SIMENON. A CHIEF INSPECTOR AT WAR /1 
Hypotheses about what Maigret was doing during First World War

Nombreux sont les maigretphiles à avoir tenté d'établir une chronologie de la carrière de Maigret. On sait combien la chose est difficile, car Simenon, il l'avouait lui-même, ne s'était pas beaucoup embarrassé de dates quand il écrivait ses romans. Mais la tentative reste intéressante, par exemple pour essayer de savoir ce que Maigret faisait pendant la guerre. Avait-il été enrôlé comme soldat, ou était-il resté occupé dans sa fonction de policier ? Ce qui complique encore la recherche, c'est qu'en réalité on pourrait considérer deux époques de rédaction pour la saga maigretienne. La première, qui correspondrait aux romans écrits pour Fayard et Gallimard, et dans laquelle les enquêtes que mène Maigret sont plus ou moins contemporaines de leur rédaction par le romancier: ainsi, l'enquête de Monsieur Gallet, décédé, explicitement datée de 1930, qui est aussi l'année où le texte du roman a été rédigé. Par contre, les romans Maigret écrits par Simenon pour les Presses de la Cité semblent, pour la plupart, évoquer le décor parisien tel qu'il l'a connu avant la deuxième guerre mondiale, un peu comme si le commissaire continuait ses aventures dans un monde définitivement fixé dans les années '30. 
Cependant, il faut remarquer qu'on trouve, dans certains des romans de la période des Presses de la Cité, quelques allusions à des événements de la deuxième guerre mondiale, et il semble que peu à peu Simenon ait décidé que les enquêtes de son commissaire se passeraient désormais dans une époque plus contemporaine de celle où vivait le romancier lui-même. C'est dire s'il devient difficile de fixer la chronologie des activités de Maigret, et en particulier de savoir comment il a vécu les deux guerres mondiales. L'exercice restera probablement éternellement un jeu de l'esprit, parce que les contradictions ne pourront jamais complètement être résolues. Néanmoins, on peut essayer quelques hypothèses, en suivant la piste des textes. 
Pour cela, il faut prendre pour base la division que nous proposions plus haut, entre les romans écrits avant le milieu du XXe siècle et ceux qui sont postérieurs. Plusieurs des commentateurs de l'œuvre simenonienne ont affirmé que celle-ci se déroulait dans un temps anhistorique, comme si le romancier avait voulu gommer toute référence à des événements extérieurs aux intrigues des romans. En réalité, si les romans qui se déroulent dans un contexte historique précis sont rares (Le train, Le clan des Ostendais, pour en citer deux parmi les plus connus), les allusions au contexte socio-historique sont plus fréquentes qu'on a bien voulu le remarquer. Il faut voir plutôt, de la part de Simenon, un parti pris de situer ses romans dans une époque sinon indéterminée, du moins pas trop précise, dans le but de donner à son œuvre cette dimension d'universalité qu'il recherchait.  
Dans le cas de la saga maigretienne, les jalons que le romancier pose dès les premiers romans (la date donnée dans Monsieur Gallet, décédé que nous avons mentionnée plus haut) posent un décor, celui du Paris (ainsi que de sa banlieue et de la province) de l'entre-deux-guerres, qui va rester la référence pour une grande partie de la saga. Dans les romans de la période Fayard, ainsi que dans les deux séries de nouvelles écrites entre 1936 et 1938, on trouve quelques allusions à la première guerre mondiale, assez clairsemées il est vrai, mais qui n'en situent pas moins un contexte, par des détails qui servent à l'intrigue. Par exemple, dans Pietr le Letton on apprend qu'Olaf Swaan est arrivé à Fécamp "peu de temps après la guerre"; dans Le chien jaune, c'est le Dr Michoux qui se souvient du front et des attaques d'obus; ou dans Liberty Bar, on sait que William Brown travaillait pour les services d'espionnage pendant la guerre. La seule allusion, dans ces textes d'avant 1950, à ce que Maigret lui-même aurait pu faire pendant cette guerre, on la trouve dans la nouvelle Tempête sur la Manche. Maigret qui, dans cette nouvelle, est à la retraite, décide de faire avec sa femme un petit voyage d'agrément en Angleterre, en prévoyant de passer une quinzaine de jours à Londres, pour aller saluer quelques collègues de Scotland Yard avec lesquels il a travaillé pendant la guerre.  
Que faut-il en déduire ? A priori, Maigret aurait pu être enrôlé sous les drapeaux lors de la mobilisation générale de 1914. A moins qu'on ne lui ait demandé de continuer à travailler pour les services de police, et, peut-être, de collaborer avec les services anglais de renseignements. L'hypothèse est d'autant plus séduisante si l'on prend en compte les calculs pour fixer sa date de naissance, et dont nous avons déjà parlé dans un autre billet. Que l'on choisisse la piste de Monsieur Gallet, décédé (en 1930, Maigret a 45 ans et il est donc né en 1885) ou celle de La première enquête de Maigret (en 1913, Maigret a 26 ans et il est donc né en 1887), dans les deux cas, c'est un jeune homme qui aurait dû partir au frontcontinuer de travailler dans la police lui aurait permis alors d'échapper aux atrocités des tranchées, et de pouvoir reprendre ses enquêtes dès la guerre terminée… 
Dans un prochain billet, nous évoquerons les activités de Maigret pendant la deuxième guerre mondiale, et nous verrons qu'il est possible de poser plusieurs hypothèses quant à ce que le commissaire a pu faire pendant cette période. 

Murielle Wenger 

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