martedì 5 febbraio 2019

SIMENON SIMENON. UN SIMENON SANS MAIGRET ?

Pourquoi le choix du commissaire a été le bon pour le romancier 

SIMENON SIMENON. UNO SIMENON SENZA MAIGRET? 
Perché la scelta del commissario era quella giusta per il romanziere 
SIMENON SIMENON. A SIMENON WITHOUT MAIGRET? 
Why the choice of the Chief Inspector was the right one for the novelist 


Maurizio, dans un post récent, se lançait dans une hypothèse intéressante, se demandant quel aurait été le destin littéraire de Simenon, s'il n'avait pas inventé Maigret. Le romancier aurait pu créer un autre personnage, par exemple un professeur inventeur d'une machine à remonter le temps, et ses romans auraient appartenu au genre de la littérature fantastique ou de la science-fiction 
Je crois que la première réponse, la plus évidente, est que si Maigret a eu un tel succès, et continue d'en avoir autant 90 ans après sa création, c'est parce qu'il est un personnage hors norme, atypique, et c'est en cela que s'est manifesté le génie de son créateur. En effet, si Simenon a opté, lorsqu'il a décidé de quitter la littérature populaire pour accéder au palier de la «semi-littérature», pour un personnage de commissaire, c'est aussi parce que le genre policier était à la mode au seuil des années 1930 (c'est en 1927 qu'était publié le numéro 1 de la collection Le Masque, Le Meurtre de Roger Ackroyd, d'Agatha Christie)et que l'argument de proposer une série policière francophone a pu jouer dans la balance pour convaincre Fayard. Simenon avait d'ailleurs rédigé auparavant plusieurs nouvelles policières, et certaines de ses productions sous pseudonymes pouvaient aussi se rattacher à ce genre.  
Mais là où il fit preuve d'originalité, c'est en imaginant un détective qui était à des années-lumière des personnages auxquels les amateurs de polars étaient habitués. Maigret n'était ni un excentrique à la Sherlock Holmes, ni un aventurier séducteur à la Arsène Lupin. Et paradoxalement, et contre toute attente de Fayard, c'est justement cela qui séduisit les lecteurs: ils retrouvaient en Maigret quelqu'un dont les goûts et le mode de vie étaient assez semblables aux leurs, mais dont les méthodes et la façon d'enquêter étaient assez particulières pour retenir l'attention.  
Je pense que le professeur proposé par Maurizio aurait eu justement le défaut de tomber dans l'écueil que Simenon a su éviter. En effet, le personnage du savant, plus ou moins fou, même bien décrit comme aurait pu le faire notre talentueux romancier, n'aurait pas été une création originale, car ce type de personnage était déjà bien connu à cette époque dans la littératureque l'on songe à quelques-unes des créatures de Jules Verne ou même au professeur Moriarty de Conan Doyle… 
D'autre part, l'autre point fort de l'œuvre simenonienne est qu'elle est ancrée dans le réel. C'est-à-dire que le monde que décrit le romancier est un monde quotidien, banal, où l'événement qui surgit et qui va bouleverser toute une vie pourrait arriver à n'importe qui, et tout lecteur peut se reconnaître dans cet univers peint par Simenon. C'est vrai aussi bien pour les romans durs que pour les Maigret, et c'est encore une autre raison du succès pérenne de l'œuvre. Parce que les angoisses, les doutes, les peurs que le romancier met en scène sont de tout temps et de tout lieu. Et les situations où le commissaire se retrouve plongé lors d'une enquête «sonnent vrai», ne semblent ni étranges ni impossibles. 
Et c'est en cela que choisir la voie du genre fantastique aurait été une erreur. Je ne dis pas que Simenon ne s'y serait pas taillé un certain succès, mais je ne suis pas sûre que ce succès aurait dépassé l'immédiat. Franchement, à part les spécialistes, qui connaît encore de nos jours certains de ces romans fantastiques ou de science-fiction qui ont fait foison au début du siècle dernier ?... Et puis, rien ne se démode plus vite que le genre fantastique, lorsque les machines et autres engins qu'on invente dans un roman deviennent réalité cent ans plus tard. Tandis que le monde décrit par Simenon, même s'il a connu quelques changements (la cabine téléphonique du petit bar remplacée par le téléphone cellulaire, les premières techniques du bertillonnage améliorées par les découvertes scientifiques sur l'ADN), reste sur le fond toujours le même.  
Même en admettant que Simenon ait connu le succès avec son personnage de professeur savant, il l'aurait sans doute abandonné dès qu'il passa à la littérature telle qu'il la concevait. Certes, Maigret a été ce tremplin qui lui a permis d'accéder à l'étape suivante, mais, parce que le personnage recelait en lui-même des potentialités, était ancré dans le réel, il a permis au romancier de petit à petit lui donner beaucoup de lui-même. Maigret, tel que le romancier l'a inventé, portait un lui quelque chose qui ne pouvait que forcer son créateur à continuer à s'intéresser à lui: sa force tranquille, sa pondération, une certaine assurance mêlée de philosophie fataliste, un équilibre que Simenon a aspiré toute sa vie à atteindre, et son personnage est probablement devenu pour lui une sorte d'idéal… inaccessible ?... 

Murielle Wenger 

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