lunedì 29 gennaio 2018

SIMENON SIMENON. VIVRE ET ECRIRE A LAKEVILLE

A propos de la dernière demeure américaine de Simenon 

SIMENON SIMENON. VIVERE E SCRIVERE A LAKEVILLE 
A proposito dell'ultima abitaziona di Simenon in America 
SIMENON SIMENON. LIVING AND WRITING AT LAKEVILLE 
About Simenon's last residence in America 


En juillet 1950, Simenon s'installe, avec sa femme Denyse et leur fils John, à Lakeville. C'est la dernière demeure américaine où le romancier séjournera. Il y restera cinq ans, un temps que son biographe Michel Carly appelle "une période de calme et d'équilibre". En effet, nonobstant les difficultés inhérentes à la situation (il vient de divorcer de Tigy et de se remarier avec Denyse, et les relations ne sont pas toujours faciles entre les deux femmes…), il savoure les joies de la paternité et il s'intègre de mieux en mieux au mode de vie américain. C'est aussi pendant cette période qu'il va écrire certains de ses grands "romans durs", ainsi que des Maigret de la meilleure cuvée.  
Lakeville a été, de l'aveu même du romancier, un lieu qu'il a beaucoup aimé: Il évoque souvent dans ses textes autobiographiques cette demeure pour laquelle il a "eu un faible", dit-il dans sa dictée Jour et nuit. Dans ses Mémoires intimes, il se fait lyrique: "Ici, dans notre vieille maison-rempart de Shadow Rock Farm, je suis envoûté, persuadé que c'est pour la vie, car je m'intègre naturellement à la vie d'un pays auquel, pour la première fois peut-être, j'ai l'illusion d'appartenir. Un univers intime et chaud […] J'aime nos ruisseaux sous leur croûte de glace, nos bois si sauvages que je n'en découvrirai qu'une partie, la neige et le froid de l'hiver, comme je vais aimer la lourde chaleur de l'été et le feuillage or, rouge et roux de l'automne." Il veut croire à cette illusion de bonheur, il veut croire que les difficultés vont s'aplanir, et de toute façon, il a toujours un refuge, celui de l'écriture. La maison de Lakeville a vu naître, entre autres, le temps d'Anaïs, Une vie comme neuve, La mort de Belle, Les frères Rico, L'escalier de fer, Feux rouges, L'horloger d'Everton, Le Grand Bob, Les témoins. Mais aussi Maigret au Picratt's, Maigret et la Grande Perche, Maigret et l'homme du banc, Maigret se trompe, Maigret et la jeune morte. 
Le dernier texte qu'il avait écrit à Carmel, sa précédente demeure, était la nouvelle Un Noël de Maigret, dans laquelle il plongeait dans l'intimité du couple Maigret. Auparavant, la dernière enquête du commissaire avait été L'amie de Madame Maigret, dont l'intrigue était située dans un Paris nostalgique et un quartier que Simenon avait bien connu (les alentours de la place des Vosges), et un roman où on apprenait que Mme Maigret collait dans un cahier les articles de journaux consacrés à son mari, disant que cela pourrait se révéler utile si son mari décidait un jour d'écrire ses mémoires… Prémonition ?...  
En septembre 1950, lorsque le romancier retrouve son héros pour le premier roman de la saga écrit à Lakevilleil éprouve en quelque sorte le besoin de faire un bilan, comme s'il sentait qu'un tournant est en train de se dessiner dans ses relations par rapport à son personnage, et, avant de repartir pour une longue série d'enquêtes, il décide de régler quelques comptes avec Maigret… Mais le trait de génie de l'auteur est de céder la plume à sa créature, et, à côté de quelques souvenirs d'enfance et de jeunesse qui permettent d'élargir encore la personnalité de son héros, il le fait se questionner sur son métier, sur sa vocation de "raccommodeur de destinées", et il en profite pour se mettre lui-même en scène de façon auto-ironique, tout en accréditant la légende de leur rencontre… Et il y ajoute, pour faire bonne mesure, quelques considérations sur sa façon d'écrire, et quelques réponses sur les reproches qu'on avait pu lui faire à propos de la saga maigretienne…  
On aurait pu imaginer, après ce bilan, et ce roman dans lequel on retrouve Maigret à la retraite, que Simenon avait décidé de laisser là son personnage, puisque, en quelque sorte, les comptes étaient réglés… En réalité, il n'en était rien, et au contraire, cette mise au point allait permettre au romancier de relancer de plus belle le commissaire sur des pistes d'investigation, d'approfondir sa relation avec lui, au point de le doter de plus en plus souvent de ses propres interrogations sur le monde… 
On aurait pu penser, aussi, que cette demeure où Simenon s'est efforcé de construire son bonheur allait être sa demeure définitive, et qu'il s'était coulé pour toujours dans cette vie américaine où il se sentait à l'aise…. C'eût été mal le connaître… Cet éternel inquiet n'était pas fait pour s'enliser dans une vie, aussi harmonieuse soit-elle… Et tout n'était pas aussi rose qu'il avait bien voulu se l'imaginer… Malgré la liberté autoproclamée de l'Amérique, il y avait des failles… Un certain puritanisme, une nécessité d'appartenir à une micro-société pour y être reconnu (et l'on sait à quel point Simenon est resté un individualiste…), et le maccarthysme qui allait passer par là… Et puis, comme l'ont relevé ses biographes Michel Carly et Pierre Assouline, le romancier n'avait pas gagné sa bataille américaine, sur le plan littéraire: certes il y était mieux connu, mais il n'avait pas rejoint le panthéon des auteurs du cru… Et il y avait eu le voyage triomphal de 1952 en Europe, qui avait sans doute laissé quelques traces nostalgiques… Des traces que l'on retrouve dans le dernier roman écrit à Lakeville, Maigret et le corps sans tête, qui évoque si bien ce coin de Paris que l'auteur a beaucoup fréquenté, autour du canal Saint-Martin. Ce sera aussi son dernier roman sur le sol américain, car Simenon a décidé de partir, presque sur un coup de tête… Hamish Hamilton, son éditeur anglais venu passer quelques temps chez lui, questionne un soir le romancier sur les raisons qui le font rester en Amérique. Simenon lui parle du climat, des bonnes écoles pour les enfants, lui donne des tas de motifs auxquels il croit sincèrement adhérer… Cette conversation semble avoir agi comme un catalyseur. Hamilton à peine parti, Georges va trouver Denyse, et lui annonce qu'il veut rentrer en Europe. Une fuite ou un nouveau passage de la ligne, l'avenir le lui dira… 

Murielle Wenger 

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