A propos des monuments parisiens évoqués dans la saga de Maigret (deuxième partie)
SIMENON SIMENON. DA PIGALLE A NOTRE-DAME
A proposito dei monumenti parigini menzionati nella serie di Maigret (seconda parte)
SIMENON SIMENON. FROM PIGALLE TO NOTRE-DAME
About the Parisian monuments mentioned in the Maigret saga (second part)
«Il y avait deux ou trois [autocars] à la Bastille, que les étrangers photographiaient comme ils avaient photographié l'Arc de Triomphe, le Sacré-Cœur et la Tour Eiffel.» (Maigret et l'homme tout seul)
La semaine passée, nous vous avions donné rendez-vous pour évoquer quelques-uns des monuments parisiens mentionnés dans la saga maigretienne. Aujourd'hui, nous allons donc nous promener un peu à travers la ville pour les découvrir.
Pigalle est un lieu où Maigret enquête très souvent, et pourtant, le Moulin Rouge, qui en est un des monuments phares, n'est mentionné que dans trois romans, pour décrire le lieu (la place Blanche) dans ce qu'il a de plus connu: «le reflet lumineux des ailes du Moulin-Rouge qui tournaient inlassablement» (Signé Picpus).
A Montmartre, le Moulin de la Galette apparaît dans la saga uniquement comme un repère, sans description: Oswald Clark et Miss Darroman vont y danser dans les Caves du Majestic, une des victimes de Moncin a été tuée «rue Lepic, un peu plus haut que le Moulin de la Galette» (Maigret tend un piège), Léonard Planchon habite «rue Tholozé, qui donne dans la rue Lepic, juste en face du Moulin de la Galette» (Maigret et le client du samedi).
Restons encore à Montmartre pour parler du Sacré-Cœur. Ce monument, qui ne manque dans aucun guide touristique, n'apparaît que dans six romans. Maigret, venu à Paris pour aider son neveu, voit le Sacré-Cœur émerger «tout blanc, de la buée de Paris» (Maigret), tandis qu'il y monte, en touriste, avec Mme Maigret, lors de vacances parisiennes (Maigret s'amuse); pour le reste, il s'agit d'un point de repère: Francis Ricain est né rue Caulaincourt «une rue bourgeoise, presque provinciale, derrière le Sacré-Coeur» (Le Voleur de Maigret), ou d'une mention «en carte postale»: un voisin de Léon Florentin est un peintre qui brosse des vues du Sacré-Cœur en série (L'Ami d'enfance de Maigret).
Changeons de quartier et rendons-nous sur la place de l'Etoile, où se trouve l'Arc de Triomphe. Dans la saga, pas de description du monument, qui ne sert qu'à se repérer, lorsqu'on le contourne pour emprunter les Champs-Elysées ou l'une des avenues adjacentes. Le jeune Maigret, enquêtant un soir dans le quartier, découvre le «perlé lumineux [des becs de gaz qui ourlent] la perspective des avenues autour de l'Arc de Triomphe» (La Première Enquête de Maigret).
De là, on peut aller jusqu'à la Tour Eiffel, «le» monument incontournable de la Ville-Lumière. Et pourtant, il n'apparaît que dans trois romans de la saga, preuve supplémentaire, s'il en fallait une, que le Paris de Maigret n'est pas celui de la brochure touristique… La Tour Eiffel n'est mentionnée que comme un élément du décor, dans une vue de Paris, telle que Maigret la découvre depuis l'appartement de Marinette Augier (Maigret et le fantôme): «Malgré la grisaille, on devinait plutôt qu'on ne voyait la Tour Eiffel, des clochers d'églises et, sur des centaines de toits laqués par la pluie, des cheminées qui fumaient.»
Si on poursuit notre chemin, on arrive à l'Hôtel des Invalides, cité seulement à deux reprises dans la saga, dont Maigret et le fantôme, où, depuis les fenêtres de l'hôtel des Jonker, on peut voir au «premier plan les ailes du Moulin de la Galette, Paris presque en entier, le tracé de ses boulevards, la trouée plus large des Champs-Elysées, les méandres de la Seine et la coupole dorée des Invalides.»
Traversons la Seine pour nous rendre à l'Opéra. Il apparaît dans la saga surtout pour évoquer les soirées qui y sont données, mais, pas plus que les autres monuments, on n'en trouve de description détaillée. On verra juste «une lune énorme et plus brillante que d'habitude [flotter] au-dessus du dôme verdâtre de l'Opéra» (Maigret et son mort).
Nous avons gardé pour la bonne bouche Notre-Dame, en une sorte d'hommage à ce monument mutilé par l'incendie qui l'a ravagé il y a quelques semaines. Le parvis de la cathédrale est un lieu de passage fréquent pour Maigret, qui le traverse lorsqu'il quitte à pied son bureau pour se rendre dans les quartiers alentours, par exemple dans Maigret et le clochard: «Leur passage, sur le parvis de Notre-Dame, avait fait s'envoler des pigeons et il y avait déjà un car de touristes, un gros car jaune, qui venait de Cologne.»; ou qu'il y revient pour un interrogatoire après avoir arrêté un suspect, comme dans Les Scrupules de Maigret, au petit matin: «Quand on atteignit les quais, les réverbères n'avaient déjà presque plus d'éclat et les tours de Notre-Dame se détachaient sur le ciel». Dans L'Ecluse no 1, la mélancolie ressentie par Maigret, à la veille d'être mis à la retraite, fait écho à une description poétique de la cathédrale: «ils firent peut-être quatre cents mètres en silence, les yeux fixés sur le pont d'Austerlitz qui dressait ses ferrailles dans un véritable feu d'artifice où l'on devinait, noyée de bleu et de rose, l'architecture de Notre-Dame».
C'est sur cette image que nous conclurons ce petit tour de ville, en espérant avoir montré que si les romans Maigret n'ont rien d'un guide touristique conventionnel, ils n'en ont pas moins la force évocatrice, et que le style d'écriture de Simenon ne peut que donner envie à ses lecteurs de se promener, en réel ou en imagination, dans le Paris du commissaire à la pipe…
Murielle Wenger
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