sabato 5 agosto 2017

SIMENON SIMENON. LES LIEUX DU NEGRE

Hypothèses de localisation du roman "Le Nègre" 

SIMENON SIMENON. I LUOGHI DEL NEGRO 
Ipotesi sui luoghi del romanzo "Il lungo uomo negro" 
SIMENON SIMENON. THE PLACES OF THE NEGRO 
Hypotheses on the localization of the novel "The Negro" 

Souvent plus oublié que réellement banni par la critique, Le Nègre (1957) est passé assez inaperçu parmi les romans de cette époque, et notamment ceux écrits à Cannes: En cas de malheur, Le Petit Homme d’Arkhangelsk et Le Fils. Production moyenne d’un auteur en pleine possession de son art, Le Nègre doit peut-être cette situation particulière à un titre à connotation plus ou moins raciste, surtout pour les lecteurs d’aujourd’hui. Paru il y a exactement 60 ans, ce roman a reçu à l’époque un assez bon accueil de la critique journalistique, sans réel enthousiasme cependant.  
Ecrit à Cannes, ce roman se passe en Picardie, et plus précisément dans la Somme. Ce pays du Nord, proche de sa Wallonie natale, a peu inspiré le romancier, même si dans Maigret et son mort, le commissaire se lance à la poursuite des «tueurs de Picardie», bande redoutable qui a torturé, violé et assassiné dans la région avant de tomber dans les filets de Maigret. La gare d’Amiens et celle d’Abbeville sont souvent ce que retiennent de la Picardie des personnages en rupture ou en fuite, comme Michel Maudet dans L’Aîné des Ferchaux. Avec Le Nègre, Simenon va cependant s’attarder dans le pays de Somme tout au long de ce roman qu’il convient aujourd’hui de (re)découvrir. Il ne s’agit pas d’une enquête de Maigret, mais d’un récit psychologique où un personnage, modeste employé de chemin de fer, tente de sortir de sa médiocrité quotidienne. Le Nègre se passe en pays de Somme, quelques années après la guerre de 1939-1945, autour d’une petite gare, quelque part entre Amiens et Abbeville … Théo, modeste chef de halte sur la ligne Paris-Calais, supporte de plus en plus mal son existence routinière et la solitude. Mais il en sait plus que les autres sur la mort d’un Noir découvert près de la voie ferrée. Il décide alors de ne rien dire à la police et d’agir pour son propre compte. Cependant le chantage qu’il veut exercer sur les frères Cadieu n’aboutira pas: l’un se suicide et l’autre prend la fuite. Théo retournera à sa vie médiocre… 
Le Nègre est le dernier roman écrit à Cannes avant le déménagement à Echandens en Suisse: ceci explique peut-être l’absence de documents permettant d’éclairer la genèse du roman. Dans ces conditions, il est tentant de reconstituer l’origine géographique de ce récit. Dans Le Nègre, on apprend que la petite gare qui sert de décor au drame dépend d’Abbeville dans la hiérarchie des Chemins de fer, mais aussi sur le plan judiciaire, puisque c’est le Parquet et un inspecteur de cette localité qui dirigent l‘enquête. En revanche, l’inspecteur de la compagnie vient d’Amiens, ville citée à maintes reprises au cours du récit. La petite gare de Versins n’existe pas dans la réalité, mais on peut émettre quelques hypothèses sur la localisation du roman grâce à quelques indices fournis par Simenon. On sait que le romancier travaillait avec des cartes détaillées et le célèbre indicateur d’horaires des chemins de fer, le Chaix. La consultation de l’édition de 1957 permet de retrouver notamment le train du matin qui passe à 6h39 dans le roman. La situation toute particulière de la gare, à l'écart de deux villages diamétralement opposés, permet de penser que Versins correspond géographiquement à Pont-Rémy, tandis que Mauricourt n’est autre que le village de Liercourt. Bon nombre de détails, comme la voie de garage et les entrepôts de Cadieu le riche, l'emplacement des cafés, hôtels et restaurants, existent bien et rendent cette hypothèse assez séduisante. La courbe du kilomètre 206 où se produit le drame est également visible sur la carte d’état-major, même si dans la réalité son emplacement est au-delà d’Abbeville. Les distances entre les différents lieux où se déroule l’action sont également mentionnées. En changeant les toponymes et en modifiant les horaires, Simenon brouille les pistes, mais la localisation du roman entre Pont-Rémy et Liercourt reste assez crédible, sans que l’on puisse confirmer cette hypothèse, faute de documents de travail de Simenon. Le romancier donne l’illusion de réel grâce à tous ces détails qui contribuent à créer la fameuse atmosphère de ses romans. On sait que Simenon s’est beaucoup servi de ses souvenirs visuels, auditifs ou olfactifs pour trouver le cadre de ses romans, mais il travaillait également avec des cartes, annuaires et indicateurs de chemins de fer. Le Nègre en est une parfaite illustration, car sa connaissance de la Somme est somme toute assez sommaire, même s’il a probablement emprunté le train Paris-Calais. La ligne de chemin de fer lui a sans doute inspiré en partie le roman. En tout cas, interviewé par le journal Le Méridionalle 7 mars 1957, alors qu’il est en train d’écrire Le Nègre, Simenon avoue au journaliste que le roman devait s’appeler à l’origine La Petite gare 
Le Nègre est un roman plus intéressant qu’il n’y paraît en première analyse, comme l’a souligné à l'époque Robert Kemp dans Les Nouvelles littéraires (numéro du 3 avril 1958): le personnage de Théo, que l’on a surnommé «un moindre» dans le village, a ruminé pendant des années de se venger, de prouver qu’il n’est pas ce «moindre» qui lui colle à la peau. A plusieurs reprises, il répètera comme un leitmotiv: «je leur montrerai». Pourtant, Théo ne saisira pas l’occasion qui lui est donnée et ne parviendra qu’à un résultat aussi lamentable que pitoyable. Ce modeste employé de chemin fait penser au personnage de Louis Maloin, le héros de L’Homme de Londres (1934), mais dans Le Nègre Simenon va beaucoup plus loin dans la psychologie du personnage et ne s’intéresse guère à l’enquête policière qui n'est alors qu’un prétexte. 

Bernard Alavoine

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