giovedì 26 luglio 2018

SIMENON SIMENON. UN REGARD IRONIQUE

A propos des descriptions de Maigret faites par le romancier 

SIMENON SIMENON. UNO SGUARDO IRONICO 
A proposito delle descrizioni di Maigret fatte dal romanziere 
SIMENON SIMENON. AN IRONIC LOOK 
About the descriptions of Maigret made by the novelist 


"Je dirais même que, dans les tout premiers romans, il avait l'air presque bovin. C'était un type énorme, un peu pachyderme" (Simenon à propos de Maigret, dans l'interview avec Roger Stéphane) 
Nous avons vu, dans deux billets précédents, comment Simenon a fait évoluer la description physique de son commissaire, comment la silhouette massive de celui-ci s'est peu à peu "intériorisée", et comment les caractéristiques psychologiques ont progressivement pris le pas sur les traits physiques. Nous avions aussi noté que la relation entre le créateur et son héros s'est approfondie au fil du temps, et que le romancier s'est rapproché du commissaire (et vice versa…) sur de nombreux points. 
Il ne faut pas oublier que lorsque Simenon crée Maigret, c'est un jeune homme de moins de trente ans qui imagine un héros déjà mûr, proche de la cinquantaine, et donc qu'il ne peut, à ce moment-là, qu'avoir une certaine distance vis-à-vis de son personnage. Comme le dit Simenon à Roger Stéphane: "Lorsque j'ai créé Maigret, j'avais vingt-cinq ans, si je me souviens bien, et Maigret en avait quarante-cinq. Donc, pour moi, c'était un vieux monsieur… Quand je montrais cette espèce de pachyderme de quarante-cinq ans, j'imaginais que plus tard, beaucoup plus tard, je serais comme lui." 
Donc, une certaine distance s'établit, au début de la saga, entre l'auteur et son personnage, et celle-ci se manifeste en particulier sur deux points: d'une part, les descriptions et les commentaires sur Maigret, vu "de l'extérieur", sont bien plus nombreuses dans les romans du début de la saga que dans les romans ultérieurs, dans lesquels le procédé de la "focalisation interne" est bien davantage utilisé, avec, en parallèle, une diminution des descriptions physiques du commissaire. D'autre part, cette distance se marque également par les termes ironiques que le romancier utilise parfois dans ces descriptions 
Si, dans les tout premiers romans de la saga, la silhouette massive du commissaire est davantage destinée à impressionner (voir le "bloc" auquel Maigret est comparé dans Pietr le Letton, ou la description "cauchemardesque" dans Le pendu de Saint-Pholien: "Il ressemblait ainsi à certains personnages des cauchemars d'enfants, à ces figures monstrueusement grossies […] qui avancent vers le dormeur comme pour l'écraser. Quelque chose d'implacable, d'inhumain, évoquant un pachyderme en marche"), très vite cependant, cette description massive peut prendre des accents ironiques, comme si le romancier était en train d'apprivoiser sa créature, et qu'il en devenait capable de le regarder d'un œil plus amusé. 
Il est vrai que dans la majorité des cas, les phrases qui décrivent le commissaire ont un ton sérieux, le romancier les utilisant pour présenter ce que la silhouette de Maigret a d'impressionnant ou de puissant; mais on trouve néanmoins plusieurs exemples où cette silhouette est décrite sur un ton ironique. Il est à remarquer d'ailleurs que dans ce cas, Simenon utilise souvent le truchement d'un autre protagoniste du roman pour poser ce regard ironique. 
Ainsi, dans Monsieur Gallet, décédé, au chapitre 2, une femme est en train de gronder son enfant, et elle dit, en parlant de Maigret: "- Tu as vu le gros monsieur, hein ? C'est un agent de police ! Si tu n'es pas sage, il te mettra en prison…" On voit ici le détournement ironique du personnage, qui est un "gros monsieur" (et non pas un "grand et lourd" commissaire), et il est décrit comme un "agent de police" (une sorte de simple gendarme sans grade…), juste bon à mettre les gens en prison. Ou, dans L'ombre chinoise, c'est Mme Martin, venue trouver Maigret à son bureau, et qui s'irrite de l'attitude de celui-ci: "tout le discours qu'elle avait préparé ne servait de rien, par la faute de cet épais commissaire". Ou encore, dans L'inspecteur Cadavre, c'est Clémentine Bréjon qui dit à sa fille: "Sais-tu, Louise, qui a servi de cornac au commissaire ?", ce à quoi le narrateur ajoute: "Le mot cornac était-il choisi à dessein pour souligner la disproportion entre le maigre Louis et l'éléphantesque Maigret ?". Le mot "éléphantesque" renvoie ici ironiquement au mot "pachyderme" qu'on trouvait dans Le pendu de Saint-PholienDans Maigret se fâche, c'est Bernadette Amorelle qui jette "un coup d'œil réprobateur à l'abdomen rebondi du commissaire".  
Mais Maigret est aussi capable d'ironie sur lui-même: ainsi, dans Mon ami Maigret, il se fait la réflexion que Pyke doit peut-être le considérer comme "un gros homme u peu balourd". Ou, dans Maigret se défend, le commissaire se décrit lui-même ironiquement comme "un gros balourd qui tête sa pipe, l'air grognon".  
Bien entendu, c'est le romancier lui-même qui place ces mots dans la bouche de son personnage, et c'est sa propre vision ironique de celui-ci qu'il propose ainsi. Une distance ironique, différente de la distance qu'il y avait autrefois entre le jeune auteur de vingt-cinq ans et le héros de quarante-cinq, mais une distance qui n'empêche pas une certaine forme d'affection qui s'est créée entre Simenon et son commissaire… 

Murielle Wenger 

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